Premier opus : Le Marteau, les Fils et la Reine

Reken : ... Des lampes! Des lampes à huile! Les dernières que j'ai vues étaient dans des musées sur l'équipement d'excavation du Second Âge, juste après l'Enfouissement! Je rêve? Dites moi que non s'il vous plaîîîîîîît! *tire sur la manche de Vanyel, pleurant presque de joie*

Vanyel : Non. On dirait pas.
Zan : Si tu veux j'peux lui mettre un coup sur l'casque, paraît que ça réveille.
Vanyel : Il va déjà assez mal comme ça. *donne une pichenette dans une des lanternes. Clong* Ouais, c'est des vraies. En fer forgé.

D'un coup, alors que le petit groupe avançait vers le phare, il y eut une sorte de flash qui les éblouit. Quand ils recouvrèrent la vue, c'était un bien triste spectacle : la terre était grise et charbonneuse, une épaisse couche de poussière semblait avoir envahi les lieux, des lanternes brisées, inutilisables, traînaient au sol, tels d'innombrables cadavres. Le lierre qui mangeait auparavant la pierre avait disparu, carbonisé par la sécheresse. Une partie du bâtiment était effondré, plusieurs gros blocs de pierre gisant au sol. Divers motifs étranges semblant venir d'un autre monde avaient été grossièrement tracés à la peinture noire sur ce qu'il restait du bâtiment. Le ciel avait repris une teinte ocre malsaine, et les arbres autour d'eux s'étaient pitoyablement ratatinés. Vanyel fit volte-face, ne croyant pas à ce qu'il se passait. Derrière eux, le même genre de paysages. La mystérieuse aura du Bois Bleu avait disparu, ainsi que les chants d'oiseaux et l'odeur agréable d'humus fraichement retourné. Vanyel se sentit soudainement en proie à un mal de crâne titanesque provoqué par l'incompréhension et la chaleur combinés. Zan ne manqua pas d'exprimer ce que tout le monde pensait tout haut.

Zan : Woh bordel de merde, c'est quoi ce foutoir ?!
Vanyel : Je... J'y comprends RIEN ! Évidemment, une zone préservée en plein milieu des terres désolées, c'était trop beau...
Zan : ça pouvait pas être un mirage, les mirages ça sent pas ! Et puis, tu l'as bien touchée c'te saleté de lanterne ! *ramasse une carcasse de lampe à huile, qui s'émiette alors qu'il la soulève*

Reken sembla avoir une lumière de génie et s'exprima alors en ces termes:
Reken: Mais c'est tout à fait normal, voyez-vous! En réalité nous sommes sous les effets d'hallucinations collectives! Alors il existe plusieurs pistes. Soit nous avons subi un choc traumatique qui nous fait plonger tous ensemble dans un état de semi-rêve collectif, depuis que nous avons rencontré ces... Machins.... Bizarres.... Bourrins... Enfin voilà.... *reprends son souffle bruyamment* Ce qui expliquerait que nous ayons cru voir des gens bizarres, de la lumière bleue, et des lanternes d'un temps révolu. Soit nous sommes en fait marqués par la rencontre avec ces gens étranges, qu'ils ne nous ont pas réellement parlé mais assommés, et à ce moment là vous n'êtes que le produit de mon imagination, il suffirait que je me tue pour me réveiller.
Ou encore, nous sommes tout simplement dans cet état depuis une piqûre d'un insecte au venin hypnotique puissant et nous croyons être en train de vivre une aventure telle que nous la voyons alors que la famille et les amis de l'insecte s'attablent autour de nous. Auquel cas nous sommes sur le point de commencer à ressentir des douleurs et des "fourmis" sur tout le corps. Ou bien encore une fois en reprenant cette hypothèse d'insecte, vous êtes le produit de mon imagination et je vais me faire manger. Et enfin, dernière possibilité: nous sommes tout des sujets de test d'une technologie d'hypnose très avancée dans un laboratoire d'une époque qui pour nous serait alors reculée mais d'où nous serions originaires puisque nos corps matériels y seraient effectivement tandis que nous croyons tribuler ici tranquillement... De l'eau s'il vous plaît.....

Le cri d'un grillon mutant se fait entendre. Il y a des choses qui ne changent pas. Zan se balance d'un pied sur l'autre, son manque de bras le mettant mal à l'aise. Vanyel considère silencieusement les hypothèses, les unes après les autres, jette encore un ou deux regards autour de lui, et hausse les épaules.

Zan : Tribuler tranquillement, il en a d'bonnes lui. J'ai connu plus posé.
Vanyel : *sort une gourde de sa sacoche et la lance à Reken*
Zan : Pauv' gars, tu délires... on devrait aller s'abriter, avant qu'ça tape.
Vanyel : C'est vrai que l'endroit à l'air assez... corrompu. On devrait s'abriter avant de devenir fous. On pourrait entrer dans les ruine de la tour.
Zan : T'es sûr que tu veux aller là-bas ? *lui attrape le bras, l'arrêtant dans son élan*
Vanyel : *soupire en se défaisant gentiment mais fermement de l'emprise* Qu'est-ce qu'il peut y avoir de plus terrible que... ce qu'on a vu à Salton'had...
Zan : On sait jamais...
Vanyel : Bon alors, on y va ou on y va pas ?
Zan : Bah, de toute façon on dirait qu'on peut pas échapper à la volonté du chef.
Vanyel : Hé, j'ai jamais dit que je vous dirigeais !
Zan : *caresse furtivement l'échine de Vanyel* Mais j'ai pas dit que ça me plaisait pas...
Vanyel : *mouvement de recul, regard noir* ça suffit Zan... On s'occupe de choses sérieuses, maintenant.
Zan : Roh, on peut jamais rigoler deux minutes avec toi.

Reken attrape la gourde et boit une bonne lampée avant de râler, comme quoi on ne le prenait jamais au sérieux.

Après quelques minutes sans rien faire, des observations montrant que l'environnement ne bougeait plus du tout et qu'ils avaient peut-être halluciné, et un long silence embarrassant, Vanyel renonça à attendre l'opinion de Zrakhen et Savid. Il jeta un regard bref à Zan, qui hocha la tête négativement. Il ne voulait toujours pas entrer dans la tour.

Vanyel : On a pas beaucoup de choix, il va bien falloir qu'on aille voir ce qu'y s'y trouve.
Zan : Mets-y les pieds en premier.
Vanyel : Parfait, si tu y tiens !

Le petit groupe avança, le demi-elfe en tête, vers la tour en ruine. À la regarder de plus près, on pouvait bien estimer que la moitié du bâtiment s'était casé la gueule. Les divers mots et phrases insensés peints grossièrement sur les murs semblaient récents, tout au plus quelques semaines. Vanyel fit une moue dépitée. Il paraissait peu probable qu'il y ait âme qui vive dans ce taudis, à part peut-être des bandits ou des vagabonds. ça ne ressemblait en rien à ce qu'on aurait pu attendre du chef lieu d'une "organisation" qui se disait puissante. Ils avancèrent néanmoins jusqu'à l'entrée de la tour, dont la porte de fer ne bloquait l'entrée qu'avec peu d'efficacité, puisque la moitié de cette porte se trouvait par terre, séparée du reste, comme coupée nette. Zan réprima un frisson, derrière Vanyel. C'était encore moins rassurant vu de près. Pris d'un réflexe stupide, sans doute, Vanyel toqua trois coups sur la porte, qui sonnèrent comme si il n'y avait que le vide derrière. Zan plaqua sa main sur sa joue, l'air paniqué.

Zan : Mais t'es complètement givré ! Et si y a quelque chose de dangereux à l'intérieur, hein ?!
Vanyel : Franchement, vu l'état du lieu Zan, je pense pas qu'il y ait quoi que ce soit ici... Quelques cloportes peut-être, mais à part ça...
Zan : Au moins ça sent pas la charogne, cette fois.
Vanyel : Oui, voilà, apprends à relativiser.

Après une minute éternelle à attendre qu'un être mystérieux vienne ouvrir la porte, Vanyel décida qu'il se sentait assez stupide comme ça, et ouvrit prudemment la porte en débloquant le loquet, passant son bras par le trou. Il fit un commentaire sur l'âge de la serrure, précisant tout haut qu'elle devait être là depuis sacrément longtemps, cette tour. Zan fit un autre commentaire concernant ces "allumés de prêtre qui nous envoient crapahuter dans des ruines sales", ce que Vanyel choisit d'ignorer. L'intérieur était, de façon prévisible, noir comme l'humeur d'un percepteur d'impôts un jour férié. Vous ne savez pas ce que ça veut dire, mais vous pensez bien que ce n'est pas très éclairant, car vous n'y voyez vraiment rien, au delà de ce que la lumière du jour éclaire.

Vanyel : ... Bon. Quelqu'un aurait une torche ? Ou un briquet ?
Zan : Et si on repartait dans l'autre sens ?
Vanyel : Pas tant qu'on saura pas ce qu'il y a ici. On est au bon endroit, les agents l'ont dit, et on nous a envoyés ici.
Zan : Mais ils sont tous fous, Van'...

Dans la pièce régnait une odeur de poussière, de vieux livre et un peu de moisissure. Au moins, ce n'est pas vivant ?

Zrakhen sort un briquet et s'allume une cigarette.

Zrakhen : On pourrait bruler quelques bouquins qui trainent, ça ferais de la lumière.

Reken posa son gros sac à terre et se mit à fouiller frénétiquement.
Reken : J'ai toujours de quoi éclairer sur moi. Comme cette fois où j'avais une lampe. Mais elle était à huile et le conteneur était ouvert alors tout avait foutu le camp dans le sac... Beaurh... Sur mon sandwich. Je parie qu'un Machi aurait aimé. Mais moi je marche pas à l'huile. Alors que eux, c'est mi-organique, mi-huile, leur régime alimentaire. C'est dommage qu'on n'en trouve pas par ici, mais c'est de la technologie naine. J'aurais bien aimé en revoir. Il paraît que j'en ai vu un quand j'étais tout bébé. ...

Nombre aléatoire (1,20) :

1

Après que Zrakhen ait sorti son briquet, ...

Reken : Non, je n'ai rien... Ou bien? *retourne fouiller*

Vanyel : Hm... C'est pas con, mais ça en ferait pas bien longtemps, de la lumière. Zan ?
Zan : J'ai pas emmené de paraffine. Tu crois quoi, que je trimballe ça comme ça ?
Vanyel : Avec un peu de chance, on pourra peut-être trouver une vieille lampe ou...

Il y eut un crachotis discret, un peu de poussière tomba du plafond, puis une lumière blafarde éclairait maladivement l'endroit. Suffisamment pour qu'on voit à peu près ce qu'il s'y passe, mais pas assez pour pouvoir lire un des livres, par exemple. C'était un vieux tube de néon accroché au plafond, qui ne semblait plus tenir à grand-chose. Cependant, au vu de la vétusté générale du lieu, il était bien la preuve que c'était habité. Le sol était jonché de vieilles feuilles griffonnées et froissées, et de boîtes de conserve vides. L'odeur de moisi s'expliquait, ça et les murs qui végétaient un peu, offrant un petit coin "d'espace vert" dans ce monde de brutes.

Vanyel : Bon d'accord, comment ça s'est allumé ?
Zan : On nous r'garde, c'est sûr.
Vanyel : Peut-être que le système s'est remis en marche.
Zan : Tout seul ?
Vanyel : De toute façon, on pas est sensés trouver des ennemis, ici.

La pièce était, malgré tout, assez vaste, et meublée de façon correcte, autrefois. Il y avait là un nécessaire de cuisine, une table avec diverses boîtes plus ou moins vides et divers contenants usés qui avaient été aménagés de façon à faire une sorte de "laboratoire du pauvre". Quant à savoir si c'était là les restes du passage d'un type paumé ou des réels habitants du lieu, mystère complet. L'escalier qui menait en haut du phare n'inspirait pas vraiment confiance, et d'ailleurs la lourde porte qui permettait la progression vers le haut était barricadée.

Sav' : Moi j'ai de quoi faire une torche, pas question qu'on touche aux livres...

Elle sortit de son sac un bâton d'une vingtaine de centimètres, un morceau de tissu et une flasque d'à peu près 50cl, remplie aux trois-quarts d'huile, qu'elle déboucha. Elle versa de l'huile sur le linge, enroula ensuite ce dernier à l'extrémité plus large du bâton et avec deux allumettes l'enflamma. Enfin, elle leva la torche au-dessus de sa tête, éclairant plus fortement toute la pièce ronde.

Et c'était le bon moment, puisque le néon claqua sans tarder, plongeant à nouveau la pièce dans l'obscurité, juste avant que la lumière de la torche n'inonde la pièce. Vanyel afficha l'ombre d'un sourire, impressionné par la capacité de Sav' à la survie. Peut-être l'avait-il sous-estimée. Zan, lui, fit une moue dubitative, attendant probablement d'autres preuves, dans le genre "moi aussi j'peux, si j'veux." Ce dernier trébucha sur une vieille caisse abandonnée, et s'étala au sol dans un volettement de feuilles de papier, lâchant un juron étouffé.

Vanyel : Pft.
Zan : Bordel de merde, ça y était pas avant, quelqu'un glisse des putains de caisse pour que je m'y cogne !
Vanyel : Pousses pas trop la parano, choupinet.
Zan : Pas la peine de te foutre de ma gueule en plus !
Vanyel : T'as de l'humour que quand ça t'arranges...
Zan : Je suis tombé sur un truc.
Vanyel : On appelle communément ça "le sol".
Zan : Huehuehue. Nan crétin, pas ça, y avait vraiment quelque chose... Un truc bizarre... *se relève péniblement avec forces plaintes, dévoilant effectivement un truc en forme de levier*
Vanyel : Ah ben tu m'étonnes que t'aies eu mal.
Zan : Ce truc m'est rentré dans le flanc.
Vanyel : *se penche et examine l'objet en question* Mais qu'est-ce que ça fout là ? On dirait un vieux mécanisme pour ouvrir une grille, mais alors très vieux.
Zan : Tu vois une grille quelque part ?
Vanyel : Y a pas 36 solutions de le savoir ! *s'empare du levier et l'actionne*
Zan : NON MAIS T'ES MALA-

Toute conversation fut brusquement interrompue par un genre de tremblement de terre qui renversa la table et brisa les instruments alchimiques. Au centre de la pièce, une sorte de grande fissure que vous n'aviez pas remarqué auparavant (c'est ce qui s'appelle avoir les yeux dans sa poche, et je reste poli) commençait à s'ouvrir en deux, divers objets tombant alors entre les plaques. Vous remarquez que cette fissure n'est pas accidentelle, elle est même plutôt rectiligne, et traverse toute la pièce, depuis la porte jusqu'au mur opposé. Par pur réflexe de conservation, les aventuriers se plaquèrent alors contre le mur de leur choix, réalisant bien vite que ça ne servait pas à grand chose. Zan tenta même une sortie, mais Vanyel le retint assez vite, répétant au groupe que tout allait bien. Le "sol" finissait de rentrer totalement dans les fondations, lorsqu'un escalier beaucoup mieux entretenu quel e reste du bâtiment daigna faire son apparition. Il semblait qu'il serpentait depuis le mur de gauche jusque dans des profondeurs inson- éclairées au néon vert. Les plaques n'avaient pas laissé place au vidé le plus total, mais plutôt à un sol sous-jacent apparemment fait de verre, bien que semblant très résistant. Il y eut un moment de silence après tout ce vacarme, pendant lequel les intrus purent entendre une sorte de petit claquement, comme une porte que l'on déverrouille.

Vanyel : Euh, bon, première nouvelle, y a un souterrain.
Zan : Ils se cachent comme des taupes en plus, je l'sens pas...
Vanyel : En tout cas, maintenant ils savent qu'on est là...

...

Zan : Et alors ?
Vanyel : CHUT, j'essaye d'entendre si quelqu'un vient !
Zan : Alors là bravo, monsieur discret. Y a qu'à lancer un truc en bas.
Vanyel : Et après tu me traites d'inconscient ?
Zan : Bon attend, ça, ça fera l'affaire. *attrape un traité indigeste à propos des races mutantes sujettes aux crises d'épilepsie et le lance dans l'escalier. Quelques secondes plus tard, on entend un "BONK", puis à nouveau, rien* Tu vois, y a rien.
Vanyel : On y descend !
Zan : C'était pas une confirmation pour tes crises de folie.
Vanyel : Quoi, tu veux repartir ? On sait qu'on est à l'endroit où il faut être, et on sait ce qu'on va y trouver !
Zan : Argument refusé.
Vanyel : Eh merde, bon, t'as qu'à faire du boudin si t'es pas content, moi j'y vais ! Pas sûr qu'on ait besoin d'éclairage, là où on va.

Dans l'esprit un peu simple par endroits, et très surexcité, comme toujours, du petit Reken, puisqu'il est un nain, quelque chose fit "fwoosh", comme un coup de vent qui passe par la fenêtre de votre apartement en plein été, quand il fait trop chaud. Pour lui, il fit "bump", comme s'il sautait depuis une hypothèse coq, sur une conclusion âne, et laissez-moi vous dire: quelle ânerie, cette conclusion...

Reken : DES NAINS! *court vers la porte*

Reken fila aussi vite que ses courtes pattes le lui permettaient, passant hors de portée des autres, et descendant dans les escaliers, manquant de tomber en avant par deux fois. Vanyel soupira, Zan émit une réclamation non prise en compte, et tous deux s'élancèrent à sa suite, plutôt rapidement pour Vanyel, on ne savait jamais ce qui pouvait arriver. Il dégaina même son revolver, prêt à parer à toute éventualité, sauf si cette éventualité pesait 150 kilos d'armure, et administrait des sédatifs au laser. Heureusement pour eux, ce ne fut pas le cas. Il y avait bien une porte en bas de l'escalier, portant le sceau du culte des Anciens Dieux, blindée et, elle aussi, en parfait état. Reken, tout à son enthousiasme, cogna à plusieurs reprises sur la porte, sous les regards consternés et/ou paniqués de ses équipiers. Un, deux, trois autres verrous sautèrent, et une plaque coulissa dans la porte, laissant apparaître deux yeux.

? : Oui ?
Vanyel : *lève un doigts, inspire, se préparant à dire quelque chose, puis se ravise* Heu.
Zan : On est sensés dire quoi là ?
? : Ne restes pas plantés là, qui vous envoie ?
Vanyel : Euh... Merde c'était quoi son nom... Un type là, de votre ordre, que vous aviez envoyé à Salton'had.
? : Maek ? Il vous a dit de venir ici ?
Vanyel : Ben, euh, ouais.
? : Hm... Je m'occupe de vous, attendez une seconde.

Le judas se referma dans un claquement sec, et l'inconnu semblait s'affairer à ouvrir quelques cadenas, dévisser quelques loquets et détacher quelques chaînes. L'opération dura une bonne minute, puis enfin la porte s'ouvrit, dévoilant un type en tunique d'un tissu plutôt élégant et en bon état, d'une belle pourpre, une pierre noire enchâssée juste sous le cou rehaussant le tout et donnant au bonhomme un air mystérieux. L'homme en lui-même était un humain, courte barbe bien taillée et coupe mi-longue soignée également. Il vous scrute de ses yeux d'ambre, mais sans aucune impolitesse. Un mince sourire étire ses lèvres, alors qu'il vous fait signe d'entrer.

? : Je suis Chayle, un des révérend de l'ordre, et chargé de la surveillance de l'Antre.
Vanyel : 'chanté.

Sitôt que tous les membres du groupe furent entrés avec plus ou moins de réticence, Chayle referma la porte derrière eux, ainsi que tous les verrous et autres systèmes de fermeture. Devant le regard déstabilisé de Vanyel, il précisa qu'avec ce qui traînait dans les terres désolées, il valait mieux ne pas prendre de risques. À l'intérieur, l'ambiance était toute autre : Un vieux poste de radio diffusait une musique plutôt étrange, mais pleine de vie. Il n'y avait pas beaucoup de sources de lumières artificielles, aussi toute a pièce était illuminée par des bougies. La pièce était remarquablement grande pour un sous terrain, et semblait plus facile à vivre qu l'extérieur. De grandes tentures ornaient les mures, représentant divers dieux, guerriers et mages, belles dames ou vénérables anciens. Un bon nombre de coussins et de fauteuils était disposés autour d'un foyer dans lequel brûlait un feu semblant surnaturel. Il régnait une fraicheur confortable, sans pour autant glacer les os. Une grande table ovale trônait au centre de la pièce, elle aussi baignant dans la lumière douce des bougies. Divers livres étaient disposés dessus, ainsi que des plateaux de ce qui semblaient être des fruits frais, chose quasiment impossible ces temps-ci. Vanyel attendit un vain un commentaire de Zan, puisque celui-ci était trop estomaqué par ce qui se trouvait derrière la porte pour parler.

Vanyel : *à Chayle* D'ailleurs, désolé, mais Maek est...
Chayle : Mort, nous le savons. Et il savait qu'en venant vous chercher, il risquait beaucoup.
Vanyel : Est-ce que ces gens... Ceux avec les armures, vous les connaissez ?
Chayle : Nous ne sommes pas fous, vous savez, nous avons des ennemis, tout le monde ne veut pas le retour des Anciens. Parmi ces ennemis, un seul ordre tente vraiment de nous arrêter, et ce sont eux.
Vanyel : Vous êtes le chef, ici ?
Chayle : *rit, cristallin* Non, bien sûr que non, je ne suis qu'un des suivants... Je suis seulement un voyageur comme vous, et je sais que j'ai trouvé un abri parmi ces gens.
Vanyel : Si vous le dites... Qu'est-ce qu'on doit faire maintenant ? Est-ce qu'ils nous poursuivent ?
Chayle : Je ne peux pas en être sûr.
Zan : Bah, on est venus pour rien !
Vanyel : Mais non...
Chayle : Maek savait que vous chercheriez des réponses, vous avez des questions. C'est pour cela qu'il vous a envoyés ici, et pour vous protéger des Templiers.
Zan : Très civil de sa part.
Vanyel : *ignorant Zan* Vous savez décidément beaucoup de choses.
Chayle : Tels sont nos privilèges, et ce n'est qu'un avant-goût de ce que les Anciens Dieux vous réservent comme cadeaux, si nous parvenons à les faire revivre. Mais cen 'est clairement pas pour tout de suite. Venez, celui que vous brûlez d'appeler "notre chef" vous attend.

Zrakhen : Par hasard vous savez comment vaincre ses trucs en armure ?

La question était posée en chemin, dans un sous-terrain qui semblait s'étendre sur plusieurs dizaines de mètres. Chayle marchait devant, éclairant le passage avec une sorte de gros cristal d'un bleu luminescent. Il ne négligea tout de même pas la question de l'elfe.

Chayle : Je pense que vous n'avez qu'une envie, c'est de vous débarrasser de ces puissants ennemis.
Vanyel : C'est vrai que ce serait pas mal.
Chayle : Vous ne connaissez pas encore la nature des templiers, n'est-ce pas ?
Zan : Vous pouvez pas juste répondre à la question ?
Chayle : Ils ne sont pas si simples à tuer que ça. Vous pensez que ce sont des soldat, n'est-ce pas ?
Vanyel : Des soldats très bien entraînés.
Chayle : Je me demande si je devrais vous expliquer ça, ou si notre dirigeant le fera de toute façon.
Vanyel : À mon avis, si vous saviez comment les vaincre, vous ne vous cacheriez plus...

Chayle arrêta sa marche un instant, se tenant presque parfaitement immobile, à l'exception de sa respiration. Vanyel se demanda un instant s'il ne venait pas de déclencher la tempête qui pouvait bouillonner sous une apparence aussi calme, puis l'homme éclata à nouveau de rire, toujours franc.

Chayle : Oui, oui vous avez raison, bien sûr. Si nous pouvions les arrêter sans y perdre des innocents, le problème ne serait plus là depuis longtemps.
Vanyel : Ils sont combien ?
Chayle : Je dirais qu'il doit en rester une quinzaine... On ne sait pas comment ils ont pu rester là tout ce temps.
Zan : Y z'égzistent depuis combien de temps ?
Chayle : Certains disent qu'ils sont nés avec le monde et qu'ils en sont les gardiens, mais nous n'y croyons pas, ce serait bien là de drôles de "gardiens". D'après leur apparence, nous pensons qu'ils doivent avoir quelques centaines d'années. Six, sept peut-être.
Zan : Tu bluffes !
Chayle : Nous ne pouvons rien avancer.
Vanyel : Alors ça doit pas être humain, ce qu'il y a dedans. Ni elfique, d'ailleurs.
Zan : C'est ça, un "dieu" ?
Chayle : Non, eux sont hors du temps. Ils étaient plusieurs légions avant, il paraît.
Vanyel : Mais alors c'est quoi ? Comment ils ont vécu aussi longtemps, et pourquoi ils vous chassent ?
Chayle : Nous arrivons devant le chef-lieu. Je pense que mon maître sera plus qualifié pour vous répondre que moi-même, désolé. Souhaitez-vous que je vous prépare quelque chose, pour le moment où vous sortirez ?
Vanyel : Euh...
Zan : C'est si gentiment demandé ! Y aurait-il à tout hasard une possibilité de faire un repas digne de ce nom ? ça fait des mois que nous ne mangeons plus que des conserves. Ah et puis j'aimerais, si vous avez ça en stock, quelques outils pour pouvoir réparer mon bras, parce que ça traîne ça traîne, mais faut bien qu'on s'en occupe. Vous avez une douche ?
Chayle : *quelque peu surpris* Oui, je pense que tout ça est faisable.
Vanyel : Je pense que ça ira, merci beaucoup l'ami.
Chayle : Vous êtes ici chez vous.

Chayle leur ouvre le passage, débouchant sur une grande pièce circulaire, elle aussi tapissée de tentures divines. Les dieux en présence sont, de gauche à droite, un guerrier en armure dont les plaques ont des formes évoquant un lion, une femme au physique juvénile, drapée dans une toge écarlate, fixant le guerrier de ses yeux jaunes. Il y a également là une représentation d'un grand homme basané, vraisemblablement une sorte de mage, semblant en état de transe, les yeux levés au ciel, paumes ouvertes. Pour clore le tableau, une sorte de barbare décorait la dernière tenture, imposant, solidement campé face à son public, une immense épée à la main. Son air guerrier faisait quasiment peur à voir, et des tatouages tribaux recouvraient quasiment chaque centimètre de sa peau. Au fond de la salle, une porte plutôt simple, si l'on excepte les deux dragons de pierre qui en gardaient l'entrée. Zan semblait ébloui par toutes ces merveilles, puisqu'on ne l'entendait plus râler. Vanyel se tourna pour demander à leur hôte comment il devait s'adresser au chef, mais Chayle avait disparu.

Vanyel : Ah bon bah tant pis.
Zan : C'est qui ces types-là ? *fixe une des tentures* Il est pas mal le guerrier, tu trouves pas ?
Vanyel : Hm. On a plus important à faire, tu crois pas ?

Vanyel respira un bon coup, puis s'approcha de la porte avec l'intention d'y frapper pour que le "chef" vienne ouvrir. Deux coups, fermes et secs, suffisent. Une voix retentit de derrière la porte, puissante malgré l'épaisseur du panneau de bois, les exhortant à entrer. Sans plus d'hésitations, le demi-elfe tourna la poignée et poussa le panneau, main nerveusement posée sur la crosse de son revolver, ne sachant pas à quoi s'attendre derrière la porte.

Une fois la porte ouverte en grand, ils purent voir une pièce plutôt grande, assez carrée dans la forme. Les murs étaient ornés d'étagères supportant des dizaines et des dizaines de livres. Un lourd bureau en parfait état -chose surprenante, mais pas beaucoup plus que les fruits frais dans la grande salle- trônait au fond de la salle, diverses machines et appareils y étant disposés. Un homme était assis derrière ce bureau, sourcils froncés et mâchoire tendue, semblant fort occupé dans la lecture de documents reliés. Sans lever les yeux, il fit signe au groupe de s'approcher du bureau, ce qui leur demanderait bien une dizaine de pas. Tout comme Chayle, il était humain, ou du moins il semblait l'être. Ses cheveux grisonnants trahissaient un âge avancé, mais sa stature solide indiquait qu'il ne devait pas avoir plus de quarante ans bien entretenus. Il se tenait droit, nez aquilin et menton provoquant, soutenus par un regard gris insondable. Pour un dirigeant, il était habillé simplement, d'un pourpoint gris broché de noir, brodé d'un curieux symbole. Celui de l'ordre, vous assumerez. Son regard était fatigué, mais une étincelle de vie bravache était bien installée au fond. Ses traits étaient quelques peu creusés, mais il consentit à se fendre d'un sourire amical pour ses visiteurs. Il aurait eu l'air parfaitement normal, si la partie supérieure droite de son visage, incluant l’œil, n'était pas remplacée par une machine. Œil mécanisé, oreille de même, tuyaux reliant une partie du nez à la partie encore présente... Vanyel fut d'abord rebuté par cet aspect, avant que le maître des lieux ne parle, d'une voix chaleureuse et riante.


? : Qu'est-ce qui vous amène dans les entrailles de la terre, voyageurs égarés ?
Zan : On est pas perdus !
? : Je n'en doute pas.
Vanyel : ça a l'air plutôt sympa, vos entrailles de la terre, c'est plus hospitalier que dehors.
? : En même temps, il vaut mieux, si nous désirons survivre ici. Vous êtes le... dirigeant de votre groupe ?
Vanyel : *regarde chaque personne* Ouais ? Enfin je pense qu'on peut dire ça...
? : Alors vous cherchez sûrement des réponses. Prenez place. *désigne d'un geste de la main quelques chaises empilées dans un coin* Je répondrais ensuite à vos questions.
Vanyel : Merci. *prend une chaise, et une pour Zan, voyant qu'il galère avec son bras en moins* D'abord... Qu'est-ce que vous savez sur nous ? J'aimerais bien comprendre comment ça se fait. Et puis comment vous vous appelez ? Je suis sûr que vous connaissez nos noms alors...
? : Je me nomme Karlan. Karlan Vesmond, pour ne rien vous cacher. Vous, vous êtes Vanyel Andromal. *hochement de tête de l'intéressé, méfiant* Vos parents étaient, de ce que vous en savez, Kemial et Elis Andromal. Ils n'ont pas eu une fin heureuse, mais c'est hélas chose rare par les temps qui courent. Vous n'avez pas eu une enfance facile, le vagabondage cédant au petit banditisme. *les yeux de Vanyel s'arrondissent au fur et à mesure* Vous vous êtes découvert Aran il y a cinq ou six ans, avec la présence providentielle de Zan.
Zan : Qu'est-ce qu'il a dit ?
Vanyel : D'accord, je crois que pour moi ça suffira.
Karlan : *se tournant vers Zan* Faites voir votre bras ? *réceptionne l'objet* Merci beaucoup. Belle facture, pour de la récupération. Nous pouvons vous réparer ça en quelques minutes, il sera comme neuf. *il appuie sur un bouton au niveau de sa tempe droite, et l'oeil mécanique sort de l'orbite, se comportant comme une lunette d'horloger, puis il continue à parler tandis qu'il examine le bras* Quant à vous, vous êtes Zan Daken, fils d'un marchand elfe et d'une gueuse de taverne. Elfe aussi. Aucun mélange, une vraie fierté pour vous. Vous avez d'ailleurs passé votre enfance à vous moquer de ceux que vous appeliez des "bâtards", pour cacher la douleur laissée par l'absence de votre mère, enlevée dans un raid.
Zan : Héé !  ça s'dit pas devant les amis, des trucs comme ça.
Karlan : Oh, dites-moi si cela vous gêne, je souhaite juste vous montrer à quel point notre connaissance de vous est fiable...
Zan : J'pense que ça ira pour moi.
Karlan : Comme vous le souhaitez. *lève son œil valide vers le nain, tandis que l'autre œil fouille le bras afin de détecter les défauts* Vous vous nommez Reken, Reken Mielsang. Vos parents, ainsi que vous alors que vous étiez enfant, avez été bannis de votre cité, condamnés à errer ou rejoindre une des communautés reniées. Votre père... *il émet un petit soupir condescendant* Ces terres hostiles auront eu raison de lui hélas, ainsi que de votre mère. Vous avez toujours été fasciné par la création de machines, et l'avez couplée à votre désir d'aider vos prochains. Dois-je continuer, seigneur Vanyel ?
Vanyel : Mais de quoi mais vous êtes même pas le premier à m'appeler seigneur en plus. Qu'est-ce que j'ai, j'ai une tête de lordifié ?
Karlan : Cela fait partie des réponses que vous cherchez. Et de la raison pour laquelle vous nous intéressez tant.
Vanyel : Venez-en au fait.
Karlan : Comme vous le souhaitez. Par contre, je vais devoir vous dévoiler... certaines choses. Peut-être ne voulez-vous pas que vos compagnons soient au courant, mais vous pourrez bien sûr leur expliquer par la suite. Pour ma part, je préfèrerais vous raconter tout ça... en privé.
Zan : Van', c'est louche...
Karlan : Vous n'avez rien à craindre de moi. Il est des vérités qui ne sont pas forcément bonnes à entendre aussi brutalement, mais il faut bien que quelqu'un vous l'apprenne un jour ou l'autre. Si tel est son désir, Vanyel vous expliquera l'histoire lorsque je vous ferais signe de revenir dans la salle.
Zan : ...
Karlan : Vous ne me faites toujours pas confiance, n'est-ce pas... *soupir* Je ne peux vous en blâmer. Vanyel, vous êtes concerné par ces révélations. Et... *se tourne vers Zrakhen* vous aussi. Nous avons des choses à vous apprendre, puis nous pourrons vous en dire plus.
Vanyel : *s'appuie sur le dossier de sa chaise* Prouvez-nous qu'on va pas mourir dès qu'ils auront passé la porte. C'est facile de prendre deux personnes au dépourvu, mais moins d'en prendre cinq.
Karlan : Chayle et les autres qui se trouvent dans le domaine s'en portent garants. Ils étaient dans votre cas avant, ils cherchaient aussi la vérité.
Vanyel : Alors vous allez nous laver le cerveau, c'est encore mieux.
Karlan : Vous ne lâcherez pas l'affaire, tel que vous êtes.
Zan : *soupire, la tête en arrière, puis se lève* D'accord, je sors. J'vais en profiter pour prendre cette douche. Mon Van, s'il t’arrive quelque chose, je le saurais, et je lui briserais les deux jambes.
Vanyel : *se lève et hoche la tête* Compris. *se tourne vers Karlan* Avec lui sur les talons, vous n'avez aucune chance si vous me faites du mal.
Karlan : *sourit à son tour* Je le pense bien. Avant que vous ne partiez, tenez. *lui tend son bras mécanique* J'ai fait comme j'ai pu, mais ça me paraît correct.
Zan : *regard méfiant, puis arrache le bras des mains du type* ... Merci.

Zan se dirigea ensuite vers la sortie, suivi, ou pas, des autres.

(vous pensiez que Reken aurait suivi le bras?)

Les yeux de Reken, son front et ses cheveux étaient tout ce qui constituaient le nain, pour le champ de vision de Karlan. Peu impressionné par ce qu'avait dit ce dernier sur lui, ou peut-être tout simplement sourd à tout ce qui se passait autour de lui, Reken observait l'oeil qui avait permi à Karlan de réparer le bras de Vanyel. Il faudrait du temps pour qu'il s'en décroche.